ISSN : 2266-6060

Spectre


Aubervilliers, octobre 2023.

En avril 2022, durant l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle, le bâtiment de l’EHESS à Aubervilliers, comme d’autres institutions universitaires, a été occupé. Cette occupation a marqué les esprits en raison de l’importance des dégâts sur un campus qui avait récemment été inauguré, mais aussi du fait des inscriptions rouges et noires laissées par les occupants, parmi lesquelles figuraient des tags antisémites. Les jours suivant l’évacuation, les agents d’entretien ont ramassé les bris, nettoyé, effacé ; les salles et les bureaux ont progressivement été remis en état ; l’École et son président ont déposé plainte et, malgré l’émotion, les séminaires ont repris leur cours.
Toutefois, les bâtiments ne sont pas une surface passive entre les mains des humains, ils ont leur propre résistance. En l’espèce, les murs recouverts de pierre ont absorbé une partie de la peinture projetée par les aérosols des occupants. Et, en dépit des efforts et des savoir-faire des professionnels de l’effacement, ici comme ailleurs, l’inscription persiste et fait désormais partie de l’écologie matérielle du bâtiment. Au dessus de la signalétique et des affichages en concurrence pour attirer l’attention, les inscriptions en capitales rouges comme « MORT AU POUVOIR » restent lisibles dès les premiers pas dans le hall. Dans cette période de réactivation de la violence politique et de la haine antisémite, on peut se demander si ces spectres d’inscriptions n’actualisent pas une menace pour les usagers du bâtiment.



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