Marque déposée
L’invité du jour : Jean-François Magre
Un détail qui cloche dans l’enchaînement des enseignes qui balisent le grand boulevard, une sorte de dissonance, un hiatus. Des travaux sur la façade d’une surface commerciale ont obligé à « déposer » la marque et à réserver ses composants, sans les disperser, à même le trottoir. Le mot démonté, disloqué, se présente comme un puzzle. On peut s’amuser de savoir si l’on reconstitue l’enseigne par les lettres ou par la spécificité de leur typographie tant il est difficile de faire la part de ce qui relève de la lecture et de la reconnaissance visuelle dans un logo, mais pas plus car nous ne sommes pas invités à jouer avec ! Ces lettres ne sont pas abandonnées sur le trottoir comme le prévient les deux cônes, mais juste très provisoirement déplacées. Elles sont évidemment très précieuses, presque sacrées comme ce signalement le suggère, c’est qu’elles portent à elles seules toute l’identité de la surface et toute la propriété de la marque puisque même le bâtiment n’est que loué et pourrait très bien abriter un magasin de bricolage ou de vêtement. Elles sont donc tabou et les deux cônes sentinelles les gardent et tiennent le passant à distance, comme si en plus de le dissuader de s’en emparer il fallait le prévenir que le désordre dans lequel elles se donnent à voir ne doit surtout pas être assimilé à une confusion, même passagère, du groupe. C’est ainsi qu’en moins d’une heure les lettres ne tarderont pas à retrouver leur ordre et leur place au frontispice.