ISSN : 2266-6060

Contamination


Invités : Marco Boubille & Virginie Lalucq

Paris, juillet 2012.

Le panneau contamine l’espace de son interdiction. Or on ne connaît ni la nature ni précisément les limites de cet espace : à proximité d’un jardin pour enfants et à quelques mètres de l’entrée d’un théâtre, on ne fait que le traverser. Alors jusqu’où va l’interdit, quel en est le point ultime, où commence-t-il ? Au sol ? Dans les airs ? Que vise-t-il ? Un ballon, une danse, un vélo, une bonne blague. Ce petit panneau rouge, situé en hauteur, à peine visible, vous attrape si mal et sans bruit qu’il doit vous prendre en plein vol, lorsque le rire vous fait basculer la tête en arrière et que tout à coup vos yeux plissés croisent à courte distance l’ordre impérieux de cesser là tous vos jeux.

On supposerait à raison que la question des jeux s’avère en réalité celle du bruit. Mais comme dit Octave dans la Règle du Jeu : « Le plus terrible dans ce monde c’est que chacun a ses raisons » et si les uns désirent le calme, les autres pourraient aussi vouloir jouer, même silencieusement. Et tout à coup, le panneau semble un panonceau auquel il manque la principale information; il n’indique pas son objet, il est si mal situé qu’il ne sait pas dire où se trouve la chose que l’on doit craindre, ce qui risque d’arriver, ce qui doit avoir (un) lieu : les jeux ne peuvent constituer un danger tels le passage d’un sanglier, un éboulement ou le verglas après la pluie. Si les jeux ne doivent pas se produire ici, il faut au moins que l’on sache où, pourquoi et à quelle vitesse. Faut-il conclure ainsi : il est interdit de jouer dans un lieu de passage ?



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