ISSN : 2266-6060

Bijoux

Lyon, printemps 2009.

Ces billets-là étaient le plus souvent épinglés à la couverture dans laquelle était l’enfant ; la mère y avait indiqué un prénom, parfois suivi d’une date, celle du baptême. Les sœurs trouvaient ce paquet humain dans le tour, cet étrange dispositif par lequel on produisait alors de l’anonymat. Ces billets « fragiles » des 18 et 19e siècles ont été pour certains conservés. Ce sont eux cent cinquante ans plus tard que l’on a placés dans la vitrine d’une exposition dans une bibliothèque. Ces missives du désespoir sont ici montrées, exposées tels des bijoux. On a pris soin de placer une lumière froide, de les coucher sur des supports non acide et d’installer une petite notice les décrivant et rappelant leur provenance. Des écrits pour souligner l’importance.

Mais de quelles valeurs ces écrits sont-ils porteurs ? Pourquoi faire d’eux des reliques d’un genre particulier : non de la sainteté mais de l’infamie ? Est-ce à cause de l’inquiétude et de l’hésitation qu’ils portent ? A côté des écrits triomphants du souverain, il y aurait ces autres écritures qui pour nous désormais parce que tracées sur des supports de misère, en une graphie tremblante, parce que signes de notre impuissance, seraient un autre trésor à protéger.

Patrimoine noir de nos humanités.



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