ISSN : 2266-6060

Gravats

Clamart, mars 2011.

Nous vivons dans un monde d’archives. Nous passons un temps fou à produire ou classer des documents qui ont pour mission de témoigner de nos vies. Ce que nous avons acheté, ce que nous avons gagné, ce que nous avons fait. Ces dossiers composent notre comptabilité privée. La plus part du temps, nous n’avons pas à nous en servir. Mais nous continuons de les fabriquer. Au cas où. De toutes façons beaucoup d’entre eux sont obligatoires aux yeux de la loi. Ils ne sont en aucun cas décoratifs ou symboliques. Ils sont d’une grande valeur. Et ils ne concernent pas seulement les personnes. Ils sont aussi essentiels à la vie de nombreuses choses, et à celle d’assemblages plus complexes comme ce magasin. Le bâtiment lui-même a ses propres archives, tout comme le commerçant, et toutes les transactions qui se sont tenues ici, entre le commerçant et ses clients, mais aussi avec ses fournisseurs. La comptabilité est la mère du capitalisme. En France, depuis la publication du Code du commerce de 1673, les commerçants doivent tenir un journal, instrument de mémoire et de contrôle. Et effectivement, aujourd’hui si vous êtes commerçant vous êtes aussi un peu archiviste. Vous prenez du temps pour tout enregistrer, pour classer les dossiers, les ranger une fois de temps en temps. Au fil des années, vous avez besoin de plus en plus d’espace pour les entreposer. Puis, un beau jour vous partez à la retraite, ou vous mourrez. Le magasin ferme définitivement. Et, en un clin d’œil, votre pile gigantesque de dossiers si importants devient un tas de gravats.



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