ISSN : 2266-6060

Fouille

Toulouse, février 2021.

À peine tapé sur un moteur de recherche, le titre d’un livre devient en quelques clics un fichier immédiatement téléchargeable, proposé dans différents formats numériques, soit sur des sites marchands, soit sur des réseaux parallèles de mise à disposition gratuite d’ouvrages. Avec le développement des collections de livres numérisés, l’accessibilité renforce la sélection préalablement filtrée et savamment aiguillée par des algorithmes jouant sur les préférences agrégées des achats antérieurs. Ce que l’on gagne en précision et en efficacité, accuentées par l’impression d’instantanéité, s’obtient par la mise entre parenthèses d’autres pratiques séculaires, propres au monde des bibliothèques. Au plaisir de la déambulation dans les rayons, ponctuée par l’arrêt transitoire de l’errance consentie devant un titre particulièrement évocateur, s’ajoute immédiatement celle de la manipulation. La souplesse ou la rigidité de la couverture, la douceur ou la rugosité du papier, son odeur mélangée à celles de l’encre et de la colle de la reliure, peuvent changer considérablement d’un ouvrage à l’autre. Toutes ces qualités matérielles engendrent des sensations qui, outre la tournure énonciative de chaque livre, plus ou moins fictionnelle, rigoureuse, intrigante, etc., orientent parfois son appréciation. À peine l’ouvrage reposé sur le rayon, la circulation sans but précis peut reprendre, toujours à l’affût d’une belle découverte, ou même d’une bonne surprise. Rien de tel que la bibliothèque d’une caserne militaire abandonnée pour exercer cet art de l’exploration scripturale et aiguiser notre curiosité pour les livres qui siègent encore, comme d’anciens combattants ayant oublié la droiture et l’ordre, sur les étagères.



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