ISSN : 2266-6060

Volume

Carry-le-Rouet, janvier 2021

Le point de vue se trouve dans un improbable endroit : situé à l’intérieur d’un très important lotissement privé, il est néanmoins accessible par la grâce de la loi littoral et d’un chemin de grande randonnée dument balisé entre les maisons plus ou moins luxueuses.
L’horizon dégagé, le bruit du ressac méditerranéen dans les oreilles, l’odeur marine et la chaleur du soleil de janvier sur la peau se conjuguent pour donner aux spectateurs l’impression de l’immersion dans une nature sauvage, immense, infinie.
Et puis, en dépit du contre-jour, ils aperçoivent des traits dessinés sur la petite planche de bois comme extraite de l’échouage d’un navire imprudent. Une demande polie, une supplique qui remet en cause l’expérience sensible : ce petit bout de mégot, concentré d’humanité et de chimie de synthèse toxique n’est pas sans commune mesure avec ce paysage paradisiaque. Deux simples fumeurs et déjà un m3 d’eau est contaminé. Mais devant eux, à 50m au-dessus de la mer, le volume d’eau à portée de vue est gigantesque : avec une profondeur moyenne à 30m et un horizon à un peu plus de 25km, on peut estimer qui’l y a environ 15 milliards de m3.
Leur action demeure donc infinitésimale par rapport à ce volume… sauf lorsque l’on apprend que 40 milliards de cigarettes sont consommées par an en France. Un volume bien suffisant pour altérer de manière invisible et irréversible ce paradis.



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