ISSN : 2266-6060

Repères

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Amsterdam, janvier 2013.

Tu es venu régulièrement dans cette gare depuis trente ans. La première fois que tu es descendu à Centraal Station, c’était au cours d’un voyage estival avec des amis au début des années 1990. Durant cinq jours seulement, tu as apprécié les caractéristiques architecturales, la multiplicité des modes de transports et, plus généralement l’ambiance qui se dégageait. Ce voyage constituait une des étapes d’un voyage d’un mois à travers l’Europe à l’aide d’un objet écrit particulier : un billet de train InteRail. Tu es alors revenu dès l’année suivante, cette fois avec un billet de train classique, pour y passer beaucoup plus de temps, explorer et apprécier d’autres aspects de la ville. Puis tu es revenu encore, pour arpenter des lieux peu fréquentés par les habitants ou les touristes. À l’époque tu accompagnais ceux qui ont développé une passion pour l’inscription de leur nom sur les wagons du métro. À l’image de ceux de New York, les deux principaux dépôts étaient régulièrement investis par des graffeurs du monde entier. Tu as ainsi eu l’occasion de découvrir d’autres coins de la gare centrale, notamment lors des heures d’attente nocturnes pour prendre le train retour vers l’autre ville des Pays Bas où tu résidais durant ce séjour. Tu es aussi repassé par Amsterdam, pour d’autres séjours touristiques en famille, sans nécessairement transiter par la gare.
Cette fois-ci, tu es venu pour une autre activité d’écriture : finaliser la rédaction d’un projet européen avec des collègues. Tu as alors redécouvert Centraal Station avec cette sensation mêlée de familiarité et d’étrangeté. Le bâtiment et les quais sont toujours les mêmes, mais de nombreux aménagements ont été effectués depuis ton dernier passage : les écrans d’information se sont modernisés et les panneaux directionnels multipliés. Celui qui décline la composition des trains est placé sur le quai, à la manière de ceux pour les TGV. Mais contrairement à tes trajets en France, tu as passé un certain temps à chercher en hauteur les repères qui permettent de se positionner à l’avance en face de ton wagon. Ce n’est qu’au détour du mouvement d’autres voyageurs qu’une marque rouge est apparue sur le quai. Au lieu d’installer de nouveaux panneaux, destinés à certains trains seulement, des carreaux servent de repères, discrets dans le paysage tout en étant particulièrement efficaces. Tu as alors compris que les éléments du bâtiment qui te semblaient si familiers, et relativement immuables, avaient eux aussi été transformés. Tu as également éprouvé combien une simple marque de couleur faisait renaître en toi ces différentes expériences accumulées ici.



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