ISSN : 2266-6060

Carte de vie

Paris, février 2012.

Chacun a dans son portefeuille une lettre précieuse, un petit mot auquel il tient ; certains les conservent même comme des talismans autour du cou, d’autres les portent dans la mémoire de leur téléphone, à l’abri des regards indiscrets. On trouve ainsi dans les descriptions détaillées des noyés, celles qui sont faites par les agents de la morgue, la liste précise de tout ce qui était dans les poches du cadavre. Pour le XVIIIe siècle, on est surpris de découvrir que même chez les plus misérables, l’écrit avait une place de choix. On gardait aussi sur soi des cartes à jouer. Une carte porte-bonheur, une dame de cœur…
Les enfants d’aujourd’hui ont cette même simplicité : ce qui est précieux pour eux, ils le savent et le disent haut et fort. Ils l’ont souvent gagné au prix de combats qu’on imagine même pas : des duels contre des créatures monstrueuses, au cours desquels ils ont laissé beaucoup de points de vie. Aussi, n’est-il pas surprenant qu’une fois la carte magique obtenue, celle-ci fasse l’objet d’une sacralisation ; elle a été lue et relue ; ils en connaissent le contenu par cœur ; pas un signe qui leur ait échappé. Non seulement il ne faut pas la perdre, la conserver dans un lieu sûr mais au demeurant il convient de la photographier. Faire une image de cet écrit au cas où. Car cette carte-là elle vaut de l’or.



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