ISSN : 2266-6060

Certifier sa signature

Clamart, mai 2018.

Signer : un acte individuel simple qui condense pourtant plusieurs actions. C’est manifester sa présence en traçant un signe. Je signe ici pour indiquer que j’étais là. Servant de base à la signature, le nom propre est convoqué dans un geste graphique qui prend une ampleur esthétique. En associant écriture et dessin d’une façon singulière, le signe pointe vers un référent unique. Je signe pour me désigner à l’aide d’une inscription. Et cette indexation est vouée à perdurer au-delà de ma présence effective dans cette situation. Je signe maintenant afin d’être toujours ici plus tard, sous une autre forme.
Signer c’est aussi manifester sa volonté. Contrairement aux empreintes digitales ou aux traces ADN qui servent à identifier une personne, la signature est intimement liée à l’intention. Je signe en étant pleinement conscient de la trace graphique que je laisse. Cette caractéristique est primordiale aux actes juridiques. L’apposition d’une signature est considérée comme l’expression scripturale explicite de la volonté. Je signe pour donner mon accord, contracter, faire un acte spécifique et situé. Inscrite sur la surface des documents, cette force de la volonté peut se retourner contre le signataire. Je signe en connaissance de cause, j’engage et j’endosse ma responsabilité.
Signer ne suffit pas toujours. Aussi puissant et multiple soit-il, le geste graphique est parfois jugé trop fragile pour tenir tout seul. C’est que le faussaire hante constamment l’inscription. Des témoins sont alors appelés à la rescousse : par leur présence, ils attestent de leurs propres yeux que le signe est effectivement tracé par son véritable auteur, dont on a préalablement vérifié la carte d’identité. Afin de garder une trace de leur présence, ces témoins oculaires signent également le document. Je signe ici sous contrôle. Pour un acte authentique comme celui-ci, d’une importance juridique supérieure, le témoin requis doit avoir le statut d’officier public : mais avant de signer à son tour, elle appose un tampon spécifique et indique la date. Afin d’être autorisé à signer, je m’en remets aux capacités scripturales d’autres signataires autorisés. Authentifier son nom, certifier sa signature : deux actes éminemment collectifs au cœur de la force de l’écrit individualisé.



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